Qui était George Auriol ?
Tout commence avec Georges Peignot (1872 – 1915). Ce fondeur de caractères, dont l’entreprise fusionnera plus tard avec la fonderie héritière de celle d’Honoré de Balzac, fut, pour reprendre l’expression du typographe Maximilien Vox, « le premier typographe français à penser que son métier n’était pas confiné à celui de fournir aux imprimeurs des petits bouts de métal. »
Homme de son temps, le début du XXe siècle, les fameuses années 1900, Peignot estimait que « l’on n’avait pas le droit, à notre époque, de se contenter des caractères existants » et que l’on ne pourrait parler de progrès que « le jour où, par son dessin même, un texte se trouverait plus en conformité avec l’esprit des choses dont il parle. ». Décidé à lutter contre la raideur typographique des didones (caractères verticaux aux hampes maigres) et à l’aspect grisâtre des vignettes, il fit appel à quelques uns des grands créateurs de son époque à commencer par Eugène Grasset (1841 – 1917) et… George Auriol (1863 – 1938).
George Auriol en quelques mots
George Auriol (sans ‘s’ à la fin), de son vrai nom Jean Georges Huyot est né à Beauvais en 1863 et est mort à Paris en 1938.
Oui, mais encore ???
Ami de Toulouse Lautrec ou de Steinlen, George Auriol fut un artiste complet : il a ainsi exercé les métiers de poète, chansonnier, peintre et surtout celui graphiste et dessinateur de caractères.
En 1885, il devint secrétaire de rédaction du Chat Noir, une publication du cabaret du même nom. C’est au « Chat Noir », fondé par Rodolphe Salis et place phare de la vie montmartroise, qu’il côtoya Claude Debussy, Paul Verlaine et bien d’autres encore. Il se lia en particulier d’amitié avec le peintre Henri Rivière avec qui il collabora étroitement, mettant en particulier en page le dernier ouvrage de celui-ci : les Les Trente-six Vues de la Tour Eiffel.
En humoriste complet, il écrivit des textes dans des revues comme
Fantasio et Pages folles et une rubrique de critique littéraire
mensuelle dans la revue ABC. On lui doit aussi des chansons,
notamment Quand les lilas refleuriront, chanté par Paul
Delmet, puis par Tino Rossi. Il a également collaboré à
de nombreux poèmes et contes.
Passionné par la flore et la faune, George Auriol puisa dans ces
deux thèmes l’essentiel de son inspiration de décorateur
de livres et de dessinateur de lettres pour affiches. De nombreuses affiches
de la Belle Époque – comme celle, en 1899, de La Gitane
de Toulouse-Lautrec – furent lettrées de sa main. De
grands éditeurs comme Larousse et Hachette lui demandèrent
de décorer leurs encyclopédies et livres d’étrennes
reliés.
En 1902, l’âge venant, il accepte la proposition du fondeur
Georges Peignot et créa plusieurs caractères, caractères
dont s’inspira Hector Guimard pour le lettrage de ses stations de
métro : Auriol Champlevé (1904) ), Française
légère (1902), Clair de Lune (1904-1911) et
Robur (1904-1911), toutes éditées par la Fonderie
Gustave Peignot & Fils. Ils sont très reconnaissables avec
leur parti pris curieux : l’apex est toujours à gauche,
l’empattement toujours à droite.
« La difficulté de marier le caractère à un dessin irrégulier et le goût parfois mauvais des imprimeurs», a déclaré Auriol dans L’Imprimerie et les procédés de gravure au XXe siècle (1906), « m’ont conduit à dessiner des lettres qui, après diverses transformations sont devenues typographiques. »
Il publia en 1902, 1909 et 1924 trois livres de cachets et monogrammes
dont, dans la préface du deuxième volume, Anatole France
apprécia le graphisme élégant: « L’originalité
de George Auriol, si sensible dès le début, s’est
encore affermie et son adresse à vivifier et à marier deux
initiales données se joue des obstacles et triomphe de toutes les
difficultés. »

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